Les mômes

Toute tranquille, vautrée dans le canapé pour finir la nuit, mon téléphone me siffle depuis la cuisine. Faut que je me lève !

A peine l’appareil entre les mains, Clémentine s’affiche. Je glisse l’écran et découvre ses mots. Je peux t’appeler ? Ben qu’est-ce qu’elle a à me demander ça ? D’habitude, elle appelle et puis c’est tout… C’est moi qui la rappelle.

– Tu es bien matinale aujourd’hui !

– Tu devineras jamais…

– Ben non, dis-moi.

– Ma fille…

– Elle est toujours au Québec ?

– Heu…

– Quoi ?

– Elle arrive.

– Ah…

Un silence coupe nos mots. Sa fille, ça doit bien faire une dizaine d’année qu’elle a pas débarqué à Paris !

– Ton passé te rattrape, ma puce ! Et elle arrive quand ?

– Cet après-midi.

– Faut aller la chercher ?

– Apparemment oui, elle est chargée, oui…

– Tu vas te démerder toute seule ?

– Ce serait sympa que tu viennes avec moi…

– Si tu veux.

– En fait, non, je vais y aller toute seule.

– Quelle heure ?

– Quatorze heures, mais je passe en bas de chez toi avant.

J’ai la matinée pour glander. Sa fille, depuis le temps, Clèm va la reconnaître ? C’est pas sûr ! Qu’est-ce qu’elle vient faire à Paris ? Tout plein de questions dans ma tête. Celle de Clèm doit pas être mieux… Ça doit trotter à une vitesse dans la sienne !

Je tourne en rond… Qu’est-ce que je vais me mettre pour croiser la môme ce soir ? Comme d’habitude, ce sera plus simple. Un slim et une chemise, ça devrait suffire.

Par la fenêtre, je vois la voiture de Clèm se garer le long du trottoir. Je descends.

– Qu’est-ce qu’elle vient faire à Paris ta gamine ?

– Je sais pas, je crois qu’elle est juste de passage.

– Elle va où après ?

– En Asie, je crois, par là en tout cas.

– Ben qu’est-ce qu’elle va foutre par là-bas ?

– Ah ça… C’est sûrement pour son taf.

– On en entendait plus parler de ta môme…

– J’avais pas de nouvelles en même temps.

– Tu en donnais pas non plus !

– Non… De fait, non !

Ça nous fait sourire.

– Bon, tu vas la reconnaître ?

– Ben quand même, oui… Enfin… Je pense…

Là, on éclate de rire. Sa fille… Elle doit lui ressembler, ça va pas être trop compliqué.

Clèm prend la route, je remonte puis vais doucement m’installer chez elle.

Un peu de temps et je l’imagine, bien droite, à regarder partout. Quatorze heures et les gens qui commencent à passer, à se diriger vers le tapis roulant des bagages. Elle qui materait toutes les nanas d’une trentaine d’années et éventuellement la verrait pas. Elle qui alors poserait les yeux sur chaque visage.

Les gens qui sortiraient au fur et à mesure qu’ils auraient récupéré leurs valises. Et peut-être toujours pas de visage connu. Quand tout à coup, elle entendrait…

– Maman !

Elle se retourne et là, à quelques mètres d’elle, une femme. Sa fille ! Les bisous et elles prendraient la route de l’appartement.

Mon portable me siffle. Des nouvelles de Clèm. Ce serait sympa si tu nous attendais chez moi.

Je comprends pas pourquoi elle a besoin de moi pour accueillir sa fille. Je m’assoupie dans un fauteuil. J’ouvre un œil quand j’entends du bruit sur le palier. J’entends que ça gratte à la porte. Le petit bruit, c’est bien Clémentine. J’ouvre.

Surprise ! Les bras m’en tombent.

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